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ne sais si la prudence me permet de satisfaire votre désir. On n’annonce au condamné la nouvelle de son exécution que quelques heures avant d’aller au supplice, et vous…

— C’est, interrompit M. Minxit, un service que j’impose à ton amitié, parce que toi seul peux me le rendre. Il faut bien que le voyageur sache à quelle heure il doit partir, afin qu’il puisse faire son portemanteau.

— Le voulez-vous donc franchement, sincèrement, monsieur Minxit ; ne vous effraierez-vous pas de l’arrêt que je vais prononcer, m’en donnez-vous votre parole d’honneur ?

— Je t’en donne ma parole d’honneur, dit M. Minxit.

— Eh bien ! alors, dit mon oncle, je vais faire comme pour moi-même.

Il examina la face pâlie du vieillard, il interrogea sa prunelle terne et dépolie, où la vie reflétait à peine quelques lueurs, il consulta son pouls comme s’il en eût écouté les battements avec ses doigts, et il garda quelque temps le silence ; puis :

— C’est aujourd’hui jeudi, dit-il ; eh bien ! lundi il y aura une maison de plus en deuil à Corvol.

— Très bien diagnostiqué, dit M. Minxit ; ce que tu viens de dire, je le pensais ; si tu trouves jamais l’occasion de te produire, je prédis que tu feras une de nos célébrités médicales ; mais, le dimanche m’appartient-il tout entier ?

— Il vous appartient, pourvu que vous ne fassiez rien qui avance le terme de vos jours.

— Je n’en veux pas plus, dit M. Minxit ; rends-moi encore le service d’inviter nos amis pour dimanche à un dîner solennel ; je