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pas toujours les hommes d’État lorsqu’ils écrivent leurs mémoires.

M. Minxit était horriblement exaspéré de l’insulte faite à son gendre et il en grinça de tous ses chicots. D’abord, il ne put s’exprimer que par des imprécations, mais, quand son indignation se fut un peu calmée :

— Benjamin, dit-il, tu es plus ingambe que moi ; tu vas prendre le commandement de l’armée, et nous allons marcher contre le château de Cambyse ; il faut que là où étaient ses tourelles, il pousse des orties et du chiendent.

— Si cela vous convient, dit mon oncle, nous raserons jusqu’à la montagne de Saint-Pierre du Mont ; mais, sauf le respect que je dois à votre avis, je crois que nous devons agir de ruse ; nous escaladerons nuitamment les murailles du château, nous nous emparerons de Cambyse et de tous ses laquais plongés dans le vin et le sommeil, comme dit Virgile ; et il faudra bien qu’ils nous embrassent tous.

— Voilà qui est bien pensé, répondit M. Minxit. Nous avons une bonne lieue et demie à faire pour arriver devant la place et il fera nuit dans une heure. Cours embrasser ma fille et nous partons.

— Un instant, dit mon oncle. Diable ! comme vous y allez ! Je n’ai rien pris de la journée, moi, et il me conviendrait assez de déjeuner avant de partir.

— Alors, dit M. Minxit, je vais faire rompre les rangs, et l’on distribuera une ration de vin à nos soldats pour les tenir en haleine.

— C’est cela, répondit mon oncle, ils auront le temps de s’achever pendant que je vais prendre ma réfection.

Heureusement pour la gentilhommière du marquis, l’avocat Page, qui revenait d’une expertise, vint demander à dîner à M. Minxit.