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— Un instant, dit mon oncle, je vous préviens, monsieur Minxit, que je veux pas consulter les urines.

— Et pourquoi, monsieur, ne voulez-vous pas consulter les urines ? Va, Benjamin, c’était un homme d’un grand sens, cet empereur qui disait à son fils : Est-ce que ces pièces d’or sentent l’urine ? Si tu savais tout ce qu’il faut de présence d’esprit, d’imagination, de perspicacité et même de logique pour consulter les urines, tu ne voudrais faire d’autre métier de ta vie. On t’appellera charlatan peut-être ; mais qu’est-ce qu’un charlatan ? un homme qui a plus d’esprit que la multitude. Et, je te le demande, est-ce la bonne volonté ou l’esprit qui manque à la plupart des médecins pour tromper leurs clients ? – Tiens, voilà mon fifre qui vient probablement m’annoncer l’arrivée de quelques fioles. Je vais te donner un échantillon de mon art.

» Eh bien ! fifre, dit M. Minxit au musicien, qu’y a-t-il de nouveau ?

— C’est, répondit celui-ci, un paysan qui vient vous consulter.

— Et Arabelle l’a-t-elle fait jaser ?

— Oui, monsieur Minxit ; il vous apporte de l’urine de sa femme qui est tombée sur un perron et a roulé quatre ou cinq marches. Mlle Arabelle ne se rappelle pas au juste le nombre.

— Diable ! dit M. Minxit, c’est bien maladroit de la part d’Arabelle ; c’est égal, je remédierai à cela. Benjamin, va m’attendre dans la cuisine avec le paysan ; tu sauras ce que c’est qu’un médecin qui consulte les urines.

M. Minxit rentra dans sa maison par la petite porte du jardin, et cinq minutes après il arrivait dans sa cuisine, harassé, courbaturé, une cravache à la main, et revêtu d’un manteau crotté jusqu’au collet.

— Ouf ! dit-il en se jetant sur une chaise, quels abominables