Page:Œuvres de Blaise Pascal, XIV.djvu/19

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
3
SECTION VIII.

presque aussi éloigné de la religion chrétienne que l’athéisme, qui y est tout à fait contraire[1] ; et de là ils concluent que cette religion n’est pas véritable, parce qu’ils ne voient pas que toutes choses concourent à l’établissement de ce point, que Dieu ne se manifeste pas aux hommes avec toute l’évidence qu’il pourrait faire.

Mais qu’ils en concluent ce qu’ils voudront contre le déisme, ils n’en concluront rien contre la religion chrétienne, qui consiste proprement au mystère du Rédempteur, qui, unissant en lui les deux natures, humaine et divine, a retiré les hommes de la corruption du péché pour les réconcilier à Dieu en sa personne divine.

Elle enseigne donc ensemble aux hommes ces deux vérités : et qu’il y a un Dieu, dont les hommes sont capables, et qu’il y a une corruption dans la nature, qui les en rend indignes. Il importe également aux hommes de connaître l’un et l’autre de ces points ; et il est également dangereux à l’homme de connaître Dieu sans connaître sa misère, et de connaître sa misère sans connaître le Rédempteur qui l’en peut guérir. Une seule de ces connaissances fait, ou la superbe des philosophes, qui ont connu Dieu et non leur misère, ou le désespoir des athées, qui connaissent leur misère sans Rédempteur[2].

Et ainsi, comme il est également de la nécessité

  1. Page 229 de la Copie.
  2. Cf. l’entretien avec M. de Saci et les fragments de la Section précédente, 547 sqq.