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NICOLE.

rier dut s’imposer aux éditeurs de Port-Royal ; on renonce à la restauration qu’on avait commencée, il est convenu, selon les termes de la préface, qu’on publiera le texte de Pascal, sans y rien changer.

Pourtant on ne peut empêcher « ces Messieurs » de metre au point les Pensées de Pascal. Non seulement, ils devaient supprimer soit des notes tout intimes, soit des fragments trop directement agressifs (et ils estimaient d’ailleurs que le duc de Roannez avait poussé un peu loin ces éliminations inévitables) ; mais ils devaient terminer les phrases, essayer de leur donner un peu de cette allure égale et régulière qui était comme le cachet de Port-Royal ; il y avait surtout à corriger ce qui dans le fond même pouvait paraître excessif et devenir dangereux[1]. On se remit de ce soin à l’exactitude de Nicole, l’éditeur de Saint-Cyran, et qui s’était déjà fait comme le collaborateur de Pascal par sa traduction latine des Provinciales. Nicole était-il pour cette tâche dans les dispositions qu’il fallait ? Nous avons de lui, sur les Pensées de Pascal, une lettre qui est fort singulière et, s’il faut tout dire, un peu affligeante[2]. Elle est nécessaire à rappeler ; car, si elle atteste la sincérité candide des éditeurs de 1670 contre lesquels Victor Cousin devait jeter les flammes d’une éloquence à coup sûr exagérée, elle nous avertit de ne pas leur reconnaître un crédit qu’ils se sont refusé à eux-mêmes. De son

  1. Un fleuron assez curieux qui figure en tête de quelques-unes des éditions de 1670 illustre l’exergue : Pendent opera interrupta. Au centre l’édifice achevé : une église avec une croix. À droite, des pierres éparses. À gauche, un premier étage régulièrement construit, et qui attend son couronnement. J’y crois voir les trois conceptions qui avaient été proposées à Port-Royal : celle de M. de Roannez, celle de Mme Périer, et enfin la solution moyenne à laquelle on s’est arrêté.
  2. Voir aux Pièces justificatives, p. ccli.