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fait, qu’il mérite bien d’être cru de tout ce qu’il a dit, jus qu’à ne point douter qu’il ne soit son fils, puisqu’il est impossible qu’une si effroyable imposture eût été accompa gnée d’une si grande abondance de grâces.

On ne peut faire que d’inutiles efforts pour exprimer ce qu’on pense des grandeurs de Jésus-Christ ; et quelque imparfaites que soient les idées qu’on en peut avoir, elles passent encore infiniment nos expressions. Peut-être même ne ferais-je que rebattre ce que M. Pascal nous en a laissé dans de certains traits à peine touchés, mais si vifs, qu’il est aisé de voir que peu de gens en ont été plus pénétrés. J’ajou terai seulement que comme la doctrine de Jésus-Christ est l’accomplissement de la loi, sa personne l’est aussi de nos preuves ; et qu’il a si divinement rempli toutes les merveilles que les prophètes en ont prédites, qu’on ne saurait dire lequel est le plus extravagant, ou de douter, comme font les athées, qu’il ait été promis un Messie, ou de croire, avec les Juifs, qu’il soit encore à venir.

Que ceux qui sentiront quelque doute là-dessus, et que cette vie divine ne touchera pas, s’examinent à la rigueur : ils trouveront assurément que la difficulté qu’ils ont à croire ne vient que de celle qu’ils auraient à obéir ; et que si Jésus Christ s’était contenté de vivre comme il a fait, sans vouloir qu’on l’imitât, ils n’auraient nulle peine à le regarder comme un objet digne de leurs adorations. Mais au moins que cela leur rende leurs doutes suspects ; et s’ils connaissent bien le pouvoir du cœur, et de quelle sorte l’esprit en est toujours entraîné, qu’ils se regardent comme juges et parties ; et que, pour en juger équitablement, ils essayent d’oublier pour un temps le malheureux intérêt qu’ils y peuvent avoir. Autre ment il ne faut pas qu’ils s’attendent de trouver jamais de lumière : la dureté de leur cœur résistera toujours aux preuves de sentiment, et jamais les autres ne pourront rien sur les nuages de leur esprit.

Cela est étrange ; mais cependant il n’est que trop vrai : non seulement les choses qu’il faut sentir dépendent du cœur, mais encore celles qui appartiennent à l’esprit, lorsque le cœur y peut avoir quelque part. En sorte qu’avec plus de lumière et de vérité qu’il n’en faut pour convaincre, elles ne le font pourtant jamais, et ne portent jamais à agir, que le