Page:Œuvres de Blaise Pascal, XII.djvu/222

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examina premièrement ce qu’en avaient dit ceux qu’on appelle philosophes.

Mais il n’eut guère de peine à montrer qu’il fallait être peu difficile pour s’en contenter, qu’ils n’avaient fait autre chose que se contredire les uns les autres et se contredire eux mêmes, qu’ils avaient trouvé toute sorte de vrai bien qu’il était impossible qu’aucun d’eux eût rencontré, puisque apparemment il doit être de telle nature, qu’on ne puisse s’y méprendre, et que les faux biens ne sauraient lui ressembler. Que si quelques-uns d’eux avaient connu que les hommes naissent méchants, aucun ne s’était avisé d’en dire la raison, ni même de la chercher, quoiqu’il n’y eût rien dans le monde de si digne de leur curiosité ; que les uns avaient fait l’homme tout grand, malgré ce qu’il sent en lui de bassesse ; et les autres tout méprisable, malgré l’instinct qui l’élève ; les uns maître de la félicité, les autres misérable sans ressource ; les uns capable de tout, les autres de rien ; enfin, qu’il n’y avait point de secte qui en parlât si raisonnablement que chacun ne sentit en soi de quoi la démentir.

Cet homme ne pouvant donc se satisfaire de cela ni aban donner aussi une recherche si importante, et jugeant bien que ce n’était pas de gens faits comme lui, et aveugles comme lui, qu’il devait attendre quelque éclaircissement ; M. Pascal lui lit venir à l’esprit, que peut-être lui et ses semblables avaient-ils un auteur qui aurait pu se communiquer à eux, et leur donner des marques de leur origine et du dessein qu’il aurait eu en leur donnant l’être. Et là-dessus parcou rant tout l’univers et tous les âges, il rencontre une infinité de religions, mais dont aucune n’est capable de le toucher. Comme il a du sens, il conçoit quelque chose de ce qui doit convenir à l’être souverain s’il y en a un, et de ce qu’il doit avoir appris aux hommes, au cas qu’il se soit fait connaître à eux, comme il a dû faire s’il y a une religion véritable.

Mais, au lieu de cela, que trouve-t-il dans cette recherche ? Des religions qui commencent avec de certains peuples et finissent avec eux ; des religions où l’on adore plusieurs dieux et des dieux plus ridicules que les hommes ; des religions qui n’ont rien de spirituel ni d’élevé, qui autorisent le vice, qui s’établissent tantôt par la force et tantôt par la fourberie, qui sont sans autorité, sans preuve, sans rien de surnaturel,