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Je pense qu’il ne reste plus, pour achever cette préface, que de dire quelque chose de l’auteur après avoir parlé de son ouvrage. Je crois que non seulement cela sera assez à propos, mais que ce que j’ai dessein d’en écrire pourra même être très utile pour faire connaître comment Pascal est entré dans l’estime et dans les sentiments qu’il avait pour la religion, qui lui firent concevoir le dessein d’entreprendre cet ouvrage.

On voit, dans la préface des Traités de l’équilibre des liqueurs, de quelle manière il a passé sa jeunesse, et le grand progrès qu’il y fit en peu de temps dans toutes les sciences humaines et profanes auxquelles il voulut s’appliquer, et par ticulièrement en la géométrie et aux mathématiques ; la ma nière étrange et surprenante dont il les apprit à l’âge de onze ou douze ans ; les petits ouvrages qu’il faisait quelquefois, et qui surpassaient toujours beaucoup la force et la portée d’une personne de son âge ; l’effort étonnant et prodigieux de son imagination et de son esprit qui parut dans sa machine arith métique, qu’il inventa, âgé seulement de dix-neuf à vingt ans ; et enfin les belles expériences du vide qu’il fit en pré sence des personnes les plus considérables de la ville de Rouen, où il demeura pendant quelque temps, pendant que le président Pascal son père y était employé pour le service du roi dans la fonction d’intendant de justice. Ainsi je ne répéterai rien ici de tout cela, et je me contenterai seulement de représenter en peu de mots comment il a méprisé toutes ces choses, et dans quel esprit il a passé les dernières années de sa vie, en quoi il n’a pas moins fait paraître la grandeur et la solidité de sa vertu et de sa piété, qu’il avait montré auparavant la force, l’étendue et la pénétration admirable de son esprit.

Il avait été préservé pendant sa jeunesse, par une protection particulière de Dieu, des vices où tombent la plupart des jeunes gens ; et ce qui est assez extraordinaire à un esprit aussi curieux que le sien, il ne s’était jamais porté au liber tinage pour ce qui regarde la religion, ayant toujours porté sa curiosité aux choses naturelles. Et il a dit plusieurs fois qu’il joignait cette obligation à toutes les autres qu’il avait à son père, qui, ayant lui-même un très grand respect pour la religion, le lui avait inspiré dès l’enfance, lui donnant pour