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reprit le prélat : donnez-moi un livre comme celui-là, je vous le rendrai lu et examiné dans quinze jours. — Je n’en doute point, Monseigneur, répliquai-je au prélat ; mais ils le feront par obéissance et par le respect qu’ils portent à votre autorité. Mais qu’un homme comme moi s’adresse à eux pour cela, ils me considéreront comme rien. »

Ensuite le prélat parla à son aumônier de l’estime qu’avait faite du livre de M. Pascal celui qui l’avait lu et qui lui en avait parlé. C’est, lui dit-il, M. de Lamothe-Fénelon. Cet aumônier lui dit qu’il le savait bien.

« Je dis à Monseigneur l’archevêque qu’il fallait qu’il prît la peine de commencer la lecture de ce livre par la préface, parce que cette lecture était nécessaire pour bien entendre le livre et qu’il ne fallait pas même omettre le petit avertisse ment, et ayant pris le livre d’entre ses mains pour le lui montrer, et l’ayant trouvé, je lui demandai s’il trouverait bon que je le lusse ; il me dit que je lui ferais plaisir. Je le lus donc et lui fis remarquer l’endroit où il est parlé du fleuron. Il me dit qu’il cesserait toute autre lecture jusqu’à ce qu’il eût lu notre livre ; ensuite il me parla de la personne particulière de M. Pascal, d’où il était, de sa famille, etc. Je le lui dis ; je lui fis une discussion autant exacte que je pus des grâces que Dieu a répandues si abondamment sur toute votre maison ; je m’arrêtai beaucoup à lui établir le mérite particulier de Mme Périer qui ne dégénère en rien de celui de l’eu M. son frère. Je lui parlai de M. Périer le jeune, et ce qui m’en donna l’occasion fut la machine de feu M. Pascal dont je parlai à ce prélat d’une manière qu’il me témoigna me vouloir du mal de ne lui avoir pas procuré la vue d’une si admirable chose, et d’autant plus qu’étant entre les mains de M. Périer il aurait eu le bien de le connaître. Ce qui augmenta son déplaisir fut le plan de son esprit que je lui fis autant que je le pus et autant que mes faibles lumières et l’habitude que j’ai eu l’honneur d’avoir avec lui me le put permettre, si bien que comme ii était la veille de Noël, le dernier coup de Vêpres sonnant on lui vint dire qu’il était temps d’aller à l’église. Je lui demandai s’il n’avait rien à me commander. Il me fit toutes les amitiés imaginables, il me fit l’honneur de me venir conduire jusques sur le pas de la porte de sa chambre et me dit en le quittant de lui faire