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Pape ; il est souscrit de M. le curé de Saint-Étienne. J’ai remarqué que tout ce qui est contenu dans ce papier est écrit d’une manière de lettre bâtarde assez longue, qui est d’un caractère tout différent de la signature. Pour moi je crus en le voyant qu’on avait donné à ce bon homme son affaire toute dressée et qu’il l’avait signée, parce que l’apparence y est tout entière. Après donc que je l’eus lu en lui remettant entre les mains il me dit ; « Eh bien M. Desprez que dites-vous de cela ? » — Je lui dis que je n’avais rien à lui dire ; que M. le curé de Saint-Étienne était un fort honnête nomme et un des curés de son diocèse qui faisait le mieux son devoir. — « Voilà, continua le prélat, un témoignage fort authentique » ; et commença à dire tout le bien possible de M. Pascal, que l’Église avait beaucoup perdu à sa mort et qu’il était une des plus brillantes lumières de notre siècle, qu’il avait tant de vénération pour sa mémoire que pour peu qu’on lui eût témoigné de désirer son approbation il l’aurait donnée de tout son cœur. — Je lui dis que c’aurait été la faveur la plus considérable que cet ouvrage aurait pu recevoir. — Il me dit : « Je l’aurais l’ait très volontiers » ; et ensuite, comme revenant de bien loin, et regardant ce livre qu’il avait entre les mains, il dit à son aumônier : « Je trouve étrange qu’on imprime comme cela des livres qui regardent la religion sans m’en parler et sans ma participation ; il n’y a qu’à Paris où cela ne se pratique pas ; car dans tous les autres diocèses on n’oserait rien imprimer qui regarde la piété sans la participation de l’évêque ou de ses grands vicaires. N’est-il pas vrai, dit-il à cet aumônier ? » — Il lui répondit : « il est vrai Monseigneur et cela est même très important. » — Il faut, dit le prélat, que je pense un peu à cela. Puis, s’adressant à moi, il me dit : « Que n’avez-vous pris l’approbation de nos professeurs ? « Vraiment, lui dis-je, Monseigneur, si nous en étions réduits là, nous n’aurions qu’à fermer nos boutiques, parce que comme ces messieurs-là ont d’autres choses à faire, ils ne se donnent la peine de lire nos livres que quand ils n’ont plus rien qui les occupe. Que je leur porte un livre comme celui de M. Pascal, ils me le garderont six mois ; et après ce temps-là, si c’est un livre qu’ils ne veuillent pas qui paraisse, ils le rendent sans donner d’approbation et sans vouloir même dire la raison pourquoi ils ne la donnent pas. — Point du tout.