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Mais afin que vous puissiez mieux juger de la vérité de ce que j’avance, et que je ne voudrais pas vous dire pour quoi que ce soit au monde si je ne le croyais très vrai en toutes ses circonstances, je vous envoie une feuille d’exemple des corrections qu’on a faites, que je dictai hier à M. votre fds. Je suis assuré, madame, que quand vous aurez vu ce que c’est, vous êtes trop raisonnable pour ne vous pas rendre et pour n’être pas bien aise que la chose soit au point qu’elle est, c’est-à-dire aussi parfaite que des fragments le peuvent être. Quand vous verrez après cela la préface qu’on a faite et que je tâcherai de vous envoyer mardi prochain ou au moins d’aujourd’huit en huit jours tout au plus tard, vous ne vous contenterez pas de donner simplement les mains à ce qu’on a fait ; mais vous en aurez de la joie, et vos entrailles tressailleront d’allégresse, selon l’expression de l’Écriture, en voyant combien dignement l’on a parlé d’un frère aussi digne de : louanges et d’estime que celui que vous aviez, et qui vous doit être bien plus cher où il est qu’il ne l’était lorsqu’il était sur la terre.

Je vous dirai encore, sans craindre de vous importuner et sans faire même de réflexion comme vous, que je suis à la fin de la quatrième page, qui est le seul endroit de votre lettre qui m’a déplu ; car à quoi bon de faire de semblables excuses à ses amis, principalement lorsqu’on écrit aussi agréablement que vous faites. Pardonnez-moi cette petite digression qui est venue si à propos que je n’ai pu m’empêcher de la faire. Je vous dirai (dis-je), madame, que j’ai examiné les corrections avec un front aussi rechigné que vous auriez pu faire ; que j’étais aussi prévenu et aussi chagrin que vous contre ceux qui avaient osé se rendre de leur autorité privée et sans votre aveu les correcteurs de M. Pascal ; mais que j’ai trouvé leurs changements et leurs petits embellissements si raisonnables que mon chagrin a bientôt été dissipé, et que j’ai été forcé, malgré que j’en eusse, à changer ma malignité en reconnaissance et en estime pour ces mêmes personnes que j’ai reconnu n’avoir eu que la gloire de M. votre frère en vue en tout ce qu’ils ont fait. J’espère que M. Périer et vous en jugerez tout comme moi et ne voudrez plus, après que vous aurez vu ce que je vous envoie, qu’on retarde davantage l’impression du plus bel ouvrage qui fut jamais. Je me charge des appro-