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témoins involontaires de la vérité de l’Évangile, et la croyance des chrétiens pour qui Jésus a accompli dans le temps annoncé exactement ce qui avait été annoncé : « Les prophéties citées dans l’Evangile, vous croyez qu’elles sont rapportées pour vous faire croire ? Non, c’est pour vous éloigner de croire[1]. » L’incrédule tire vanité des objections que le raisonnement oppose à l’interprétation chrétienne de la Bible ; en réalité rien ne devrait l’épouvanter comme cette révolte de la raison contre l’autorité de la parole révélée ; n’est-ce pas le signe que l’on est exclu et réprouvé ? Au contraire, pour ceux qui lisent avec la véritable inclination du cœur, pour les élus, « tout tourne au bien, jusqu’aux obscurités de l’Écriture[2] » ; toute leur pensée est orientée vers l’amour exclusif de Dieu, tout devient une occasion de le retrouver derrière les images sensibles et matérielles qui plaisaient aux Juifs « La charité, dit Pascal, n’est pas un précepte figuratif[3] » ; elle n’est pas à interpréter, mais elle est au contraire la clé de l’interprétation, la vérité absolue qui discerne le sens et mesure la portée de tout le reste. Aussi on a compris que Jésus est le Messie, dès qu’on a compris qu’il devait renverser toutes les idées du vulgaire sur le Messie. Les Juifs charnels attendaient le Roi de la terre, dispensateur de richesses et de joies sensibles ; fatalement ils devaient méconnaître, blasphémer, tuer celui qui, humble, ignoré de tous, venait « dans un avènement de douceur » inaugurer le règne de la bassesse et de la charité. « Chacun trouve ce qu’il a dans le fond de son cœur[4]. » Déjà il faut être saint pour comprendre la sainteté.

  1. Fr. 568.
  2. Fr. 575.
  3. Fr. 665.
  4. Fr. 675.