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ny l’un ny l’autre, et à se conserver un libre usage de tout. Ainsi on ne peut dire ny de l’Évangile seul, ny de l’Apologie seule, qu’ils contiennent leurs sentimens. Le dérèglement qu’on leur reproche consiste dans cet assemblage, et leur justification ne peut consister qu’à en faire la séparation, et à prononcer nettement qu’ils reçoivent l’un, et qu’ils renoncent à l’autre : de sorte qu’il n’y a rien qui les justifie moins, et qui les confonde davantage, que de ne nous répondre autre chose, lors que tout le fort de nostre accusation est qu’ils unissent par une alliance horrible Jésus-Christ avec Belial[1], sinon qu’ils ne renoncent pas à Jésus-Christ, sans dire en aucune manière qu’ils renoncent à Belial.

Tout ce qu’ils ont donc gagné par leur écrit, est qu’ils ont fait connoistre eux-mesmes à ceux qui n’ozoient se l’imaginer, que cet esprit d’indifference et d’indécision entre les veritez les plus nécessaires pour le salut, et les faussetez les plus capitales, est l’esprit non seulement de quelques-uns de ces Pères, mais de la Société entière ; et que c’est en cela proprement que consistent par leur propre aveu les sentimens des Jésuites.

Ainsi c’est par un aveuglement étrange où la providence de Dieu les a justement abandonnez, qu’après qu’ils nous ont tant accusez d’injustice, d’imputer à toute leur Compagnie les opinions des particuliers ; et que pour se faire reconnoistre ils ont

  1. Paul. II Cor. VI, 15, Quæ autem conventio Christi ad Belial ?