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ce seroit au contraire détruire la foy, que de vou- loir révoquer en doute le rapport fidèle des sens. C'est pourquoy S. Thomas remarque expressément, que Dieu a voulu que les accidens sensibles sub- sistassent dans l'Eucharistie, afin que les sens qui ne jugent que de ces accidens, ne fussent pas trom- pez : Ut sensus à deceptione reddantur immunes^.

Concluons donc de là, que quelque proposition qu'on nous présente à examiner, il en faut d'abord reconnoistre la nature, pour voir auquel de ces trois principes nous devons nous en rapporter. S'il s'agit d'une chose surnaturelle, nous n'en jugerons ny par les sens, ny par la raison ; mais par l'Escriture et par les décisions de 1 Eglise. S'il s'agit d'une propo- sition non révélée et proportionnée à la raison natu- relle, elle en sera le propre juge ; et s'il s'agit enfin d'un point de fait, nous en croirons les sens, aus- quels il appartient naturellement d'en connoistre.

Cette règle est si générale, que selon S. Augustin et S. Thomas quand l'Escriture mesme nous pré- sente quelque passage, dont le premier sens littéral se trouve contraire a ce que les sens ou la raison reconnoissent avec certitude, il ne faut pas entre- prendre de les desavouer en cette rencontre, pour les soumettre à l'autorité de ce sens apparent de l'Escriture ; mais il faut interpréter l'Escriture, et y chercher un autre sens qui s'accorde avec cette vérité sensible ; parceque la parole de Dieu estant

I. Cf. cette citation de S^ Thomas, supra p. 21.

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