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DIX-HUITIÈME PROVINCIALE 29

cette infaillibilité de l'opération de Dieu destruise en aucune sorte la liberté naturelle de l'bomme, par les secrettes et admirables manières dont Dieu opère ce changement, que S. Augustin a si excellemment expliquées, et qui dissipent toutes les contradictions imaginaires, que les ennemis de la grâce efficace se figurent entre le pouvoir souverain de la grâce sur le libre arbitre, et la puissance qu'a le libre arbitre de résister à la grâce. Car selon ce grand Saint, que les Papes et l'Eglise ont donné pour règle en cette matière, Dieu change le cœur de l'homme par une douceur céleste qu'il y répand, qui surmontant la délectation de la chair, fait que l'homme sentant d'un costé sa mortalité et son néant, et découvrant de l'autre la grandeur et l'éternité de Dieu, conçoit du dégoust pour les délices du péché qui le séparent du bien incorruptible; ^et trouvant sa plus grande joye dans le Dieu qui le charme, il s'y porte infail- liblement de luy-mesme, par un mouvement tout libre, tout volontaire, tout amoureux ; de sorte que ce luy seroit une peine et un supplice de s'en sépa- rer ^ Ce n'est pas qu'il ne puisse toujours s'en éloi- gner, et qu'il ne s'en éloignast eifectivement s'il le voaloit ; mais comment le voudroit-il, puisque la

��1. B. et, manque.

2. Les Jésuites ne répondirent pas à la dix-huitième Provinciale ; Nicole la fit suivre d'un Dialogue pour servir d'éclaircissement à la dix-huitieme Lettre, où il expose la théorie de la délectation victo- rieuse et de la grâce efficace. Il y a lieu de rapprocher de cette Pro- vinciale les Ecrits sur la grâce de Pascal oii il développe longuement cette théorie.

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