Page:Œuvres de Blaise Pascal, VII.djvu/146

Cette page n’a pas encore été corrigée

132 ŒUVRES

propre conscience soyent convaincues que nous n'agissons que pour Dieu, nostre exemple estant la plus grande instruction que nous leur puissions donner. Car le diable leur donne de la mémoire pour les faire resouve- nir de nos moindres défauts, et il la leur oste pour em- pêcher qu'elles ne se souviennent du peu de bien que nous faisons.

12. C'est pourquoy nous ne sçaurions trop prier Dieu, trop nous humilier, et trop veiller sur nous mesmes, pour nous aquiter de ce que nous devons aux Enfans, puisque l'obéissance nous y engage, et je voy que c'est l'une des plus importantes obeïssances de la maison, et nous ne sçaurions trop trembler en nous en aquitant, quoy qu'il ne faille pas estre pusillanimes, mais mettre toute nostre confiance en Dieu, et le forcer par nos gemissemens à nous accorder ce que nous ne méritons pas par nous mesmes, mais ce que nous luy demandons par le sang de son Fils répandu pour ces âmes innocentes qu'il nous a mises entre les mains. Car nous devons tousjours regarder ces petites âmes comme de sacrez deposts qu'il nous a confiez, et dont il nous fera rendre conte. C'est pourquoy il faut moins parler à elles qu'à Dieu pour elles.

i3. Et comme nous sommes obligées d'estre tousjours parmy elles, il se faut comporter en sorte qu'elles ne puissent pas remarquer d'inégalité dans nostre humeur, en les traitant quelquefois avec trop de mollesse, et d'au- tres fois trop sévèrement. Ce sont deux défauts qui se suivent d'ordinaire : car quand on se laisse emporter à leur faire tant de petites caresses et flateries, leur laissant la liberté de s'épandre autant que leur humeur et incli- nation les y porte, il faut infailliblement que la reprehen- sion suive, et c'est ce qui fait l'inégalité qui est beaucoup

�� �