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SEIZIÈME PROVINCIALE


la pureté de la Morale Chrétienne. Je sçay, mes Peres, le merite de ces pieux solitaires qui s’y estoient¹ retirez, et combien l'Eglise est redevable à leurs ouvrages si édifians et si solides. Je sçay combien ils ont de pieté et de lumiere. Car encore que je n’aye jamais eu d'establissement avec eux, comme vous le voulez faire croire sans que vous sçachiez qui je suis, je ne laisse pas d'en connoistre quelques-uns, et d’honnorer la vertu de tous². Mais Dieu n'a pas renfermé dans ce nombre seul tous ceux qu'il veut opposer à vos desordres. J'espere avec son secours, mes Peres, de vous le faire sentir : et s’il me fait la grace de me soutenir dans le dessein qu’il me donne d'employer pour luy tout ce que j’ay receu de luy³, je vous parleray de telle sorte, que je vous feray peut-estre regreter de n’avoir pas affaire à un homme de Port-Royal⁴. Et pour vous le témoigner, mes Peres, c’est qu’au lieu que ceux que vous outragez par cette insigne calomnie, se contentent d’offrir à Dieu leurs gemissemens, pour vous en obtenir le pardon, je me sens obligé moy qui n’ay point de part à cette injure, de vous en faire rou-

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1. Ils étaient sortis de Port-Royal le 23 mars, par ordre du roi.

2. W. Tametsi enim... nunquam. in Regio Portu certum mihi domicilium fuerit, mihi tamen quidam illorum familiariter noti sunt ; cæteri, quo mois ignoti, ob virtulis meritum charissimi. — La traduction de Nicole indique le sens qu’il faut donner à la pensée de Pascal souvent travestie. Pascal n’avait jamais fait que des retraites à Port Royal, et si on avait voulu l’atteindre en dispersant les Solitaires, ou les Hermites, on s’était mépris. Cf. le début de la dix-septième Provinciale, infra p.342.

3. W. quicquid de illo accepi. — Cette traduction montre qu'il ne faut pas voir ici, comme l'a fait Havet, une manifestation d'orgueil.

4. W. antiquos illos de Portu Regio adversarios.