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392 ŒUVRES

M. de Rouannez estoit fils de M. le marquis de Boisy. Madame sa mere estoit fille de M. Hennequin, President du Parlement, et il estoit petit-fils de M. le Duc de Rouannez; Madame sa grand’mere estoit sœur de M. le comte d’Harcourt.

Il perdit M. son pere à l’âge de 8. ou 9. ans, et fut mis entre les mains de M. son grand-pere, qui ne connoissoit gueres la religion et qui estoit un homme tres-emporté et peu capable de donner une education chrestienne à un enfant. Il luy donna un gouverneur qui n’en estoit pas plus capable que luy; il alla mesme jusques-là que d’ordonner à son gouverneur de luy donner l’air de cour, et de luy apprendre à jurer, croïant qu’il falloit qu’un jeune seigneur prit ces manieres-là. Il perdit M. son grand-pere à 13. ans, et alors il fut son maistre. Madame sa mere, qui estoit une bonne femme toute simple ne pouvoit et ne sçavoit pas mesme en prendre soin. Cependant il ne laissa pas de commencer assez jeune à avoir des sentiments de religion. Il avoit un très bon esprit, mais point d’estude. Il fit connoissance (je ne sçay pas bien à quel age) avec M. Pascal qui estoit son voisin ; il gouta fort son esprit et le mena mesme une ou deux fois en Poitou avec luy, ne pouvant se passer de le voir. Lorsque M. de Rouannez eut environ 22. ou 23. ans, M. Pascal s’estant donné à Dieu pleinement, et ayant pris resolution d’abandonner le monde entierement, persuada à M. de Rouannez d’entrer dans les mesmes sentimens. Il y entra tres fortement, et environ à 24. ou 25. ans, il resolut, avec M. Pascal et M. Singlin, entre les mains de qui M. Pascal l’avoit mis, de prendre quelque tems pour examiner devant Dieu ce qu’il devoit faire. Il prit ce tems-là ; M. Pascal demeuroit alors chez luy ; il luy avoit donné une chambre, où il alloit de tems en

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avait été pensionnaire à Port-Royal avec Mlle de Rouannez, pour qui Mme Perier fut en quelque sorte une directrice de conscience, après la mort de Pascal et jusqu’en décembre 1664, date de son départ pour l’Auvergne. Vide supra T. I, p. 131, ce que Marguerite Perier, dans sa Vie de Pascal, dit encore du duc de Rouannez, de son amitié avec Pascal, et de son projet de mariage.