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372 ŒUVRES

parceque JESUS-CHRIST veut, que nous donnions aux pauvres non seulement la dixiéme partie, mais tout nostre superflu. Et cependant il ne plaist pas à Vasquez, qu’on soit obligé d’en donner une partie seulement, tant il a de complaisance pour les riches, de dureté pour les pauvres, et d’opposition à ces sentimens de charité, qui font trouver douce la verité de ces paroles de S. Gregoire 1, laquelle paroist si dure aux riches du monde : Quand nous donnons aux pauvres ce qui leur est necessaire, nous ne leur donnons pas tant ce qui est à nous, que nous leur rendons ce qui est à eux : et c’est un devoir de justice, plutost qu’une œuvre de misericorde.

C’est de cette sorte que les Saints recommandent 3 aux riches de partager avec les pauvres les biens de la terre, s’ils veulent posseder avec eux les biens du ciel. Et au lieu que vous travaillez à entretenir dans les hommes l’ambition qui fait qu’on n’a jamais de superflu, et l’avarice qui refuse d’en donner quand on en auroit, les Saints ont travaillé au contraire à porter les hommes à donner leur superflu, et à leur faire connoistre qu’ils en auront beaucoup, s’ils le mesurent, non par la cupidité qui ne souffre point de bornes, mais par la pieté qui est ingénieuse à se

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1. W. Reg. Past. p. 3. ad 22. — St Grégoire, Liber pastoralis curæ. Pars III, admonitio XXII (édition de 1640, T. III, p. 204): Nam cùm quæ libet necessaria indigentibus ministramus, sua illis reddimus, non nostra largimur : justitiæ debitam potius solvimus quàm misericordiæ opus implemus.

2. B. [rude].

3. W. præcipiebant.