HUITIÈME PROVINCIALE
matiere, que par la surprise de voir des livres de Religieux pleins de décisions si horribles, si injustes, et si extravagantes tout ensemble. Il poursuivit donc en liberté son discours dont la conclusion fut ainsi. C’est pour cela, dit-il, que nostre illustre Molina, je croy qu’après cela vous serez content, décide ainsi cette question : Quand on a receü de l’argent pour faire une meschante action, est-on obligé à le rendre ? Il faut distinguer, dit ce grand homme, si on n’a pas fait l’action, pour laquelle on a esté payé, il faut rendre l’argent; mais si on l’a faite, on n’y est point obligé : si non fecit hoc malum, tenetur restituera, secus si fecit. C’est ce qu’ Escobar rapporte au tr. 3. ex. 2. n. 138. 1.
Voilà quelques-uns de nos principes touchant la restitution. Vous en avez bien appris aujourd’huy ; Je veux voir maintenant comment vous en aurez profité. Respondez moy donc. Un Juge qui a receü de l’argent d’une des parties pour 2 faire un arrest en sa faveur, est-il obligé à le rendre ? Vous venez de me dire que non, mon Pere. Je m’en doutois bien, dit-il; Vous l’ay-je dit generalement ? Je vous ay dit qu’il n’est pas obligé de rendre, s’il a fait gagner
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1. Cf. ce texte d’Escobar, supra p. 124, La 6e Imposture se propose d’établir que St Thomas et St Antonin soutiennent la même thèse que Molina. Nicole répond dans sa note I, § 2 où il cite des textes contraires tirés de ces auteurs ; il le fait surtout dans sa note II : « De l’imprudence des Jésuites qui étendent aux honnêtes femmes, aux filles et aux Religieuses ce que les loix n’accordent qu’aux prostituées. »
2. B. [rendre] un [jugement] ; W. ne met pas cette phrase en caractères italiques.