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LETTRE DE JACQUELINE PASCAL 379

court, et la figure du monde passe; mais la vérité sera éter- nellement. Celuy quia hit Petrus Aurellas, n'a point regardé les hommes, mais le Sacerdoce de J.-G. qui sera la magnifi- que recompence de ce saint homme, et elle l'est desja.

��[de Port-Royal de Paris] mai 1657.

Il n'y a rien de plus juste, que de pleurer un homme* à qui tout le monde perd tant ; mais il ne faut pas estre injuste en manquant d'adorer tous les jugemens toujours saints et équitables de Dieu. Je voy un vuide horrible dans le monde par cette mort; mais enfin c'est Dieu qui l'a fait. Je suis dans une peine extrême de M. de Singlin, et tous nos amys qui luy ont trouvé un visage terrible. Dieu nous fasse miséricorde, s'il luy plaist. Vous aurez l'enfant toute accablée de douleur, en sorte qu'elle n'a peu avoir delà joye de s'en retourner estant incapable d'en avoir de quoy que ce soit, je crains qu'elle ne soit malade. Elle a tesmoigné bien de la crainte de Dieu, et n'a dit que très peu de paroles, pleines de jugement. Elle s'avisa fort bien, quoy qu'estoufant de pleurer, de prier M. Singlin de luy servir de Père.

Je croy ce que vous dites ; et ne doutte nullement, que quand nous serons humiliée et mortifiée, mesprisant tout et ne nous appliquant qu'à Dieu, il nous consolera dans nos afflictions; ou bien il nous y sanctifiera, qui sera nostre meilleur.

Ne vous inquiétez pas de cette parole dont vous vous estes sitost repentie. Cela me suffit, ma très chère; et quand il vous eschaperoit cinq cens paroles pires beaucoup que celle-là, pourveu que cette soumission soit au fond de vostre cœur, elles ne me blesseront nullement. Car voyez-vous, ma très chère Sœur, je n'ay pas l'injustice de vous vouloir impeccable : je me contenteray très bien et m'estimeray trop heureuse que vostre

I. Dugué de Bagnols, mort le i5 mai.

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