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que le discours de ceux qui veulent définir ces mots primitifs. Quelle nécessité y a-t-il, par exemple, d'expliquer ce qu'on entend par le mot homme? Ne sçait-on pas assez quelle est la chose qu'on veut dé- signer par ce terme? Et quel avantage pensoit nous procurer Platon, en disant que c'estoit un animal à deux jambes sans plumes? Gomme si l'idée que j'en ay naturellement, et que je ne puis exprimer, n'es- toit pas plus nette et plus seure que celle qu'il me donne par son explication inutile et mesme ridicule ; puisqu'un homme ne perd pas l'humanité en per- dant les deux jambes, et qu'un chapon ne l'acquiert pas en perdant ses plumes \

Il y en a qui vont jusqu'à cette absurdité d'expli- quer un mot par le mot mesme. J'en sçay qui ont défini la lumière en cette sorte : La lumière est an mouvement luminaire des corps lumineux, comme si on pouvoit entendre les mots de luminaire et de lumi- neux sans celui de lumière^. On ne peut entrepren-

que le mouvement que ne fait celuy qui dit : est actus entis in poten- tia proutin potentia, et ainsy des autres » (édition Adam-Tannery, T. II, p. 597). Il est à noter que ce passage de la lettre de Descartes, dont l'autographe a été conservé, ne figure pas dans l'édition que Clerse- lier en a donnée d'après la minute ^Lettres de M Descartes, T. II. 1659, p. i83-i88).

I. Souvenir de Montaigne (^Apol.) : « Veoyez prendre à mont l'es- sor à Platon en ses nuages poétiques, veoyez chez luy le jargon des dieux; mais à quoy songeoit il, quand il définit l'homme un animal à deux pieds, sans plumes, fournissant à ceux qui avoient envie de se mocquer de luy une plaisante occasion ; car ayants plumé un chapon vif, ils alloient le nommant l'Homme de Platon » (anecdote empruntée par Montaigne à Diogene Laërce, IV, 4o).

3. Voir la lettre du Père Noël à Pascal, sapra T. II, p. 89; et la Réponse de Pascal, Ibid., p, loô : «Comme nous n'employons jamais

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