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dites ; car il n'y a rien de plus permis que de donner à une chose qu'on a clairement designée un nom tel qu'on voudra * . Il faut seulement prendre garde qu'on n'abuse de la liberté qu'on a d'imposer des noms, en donnant le mesme à deux choses différentes. Ce n'est pas que cela ne soit permis, pourvu qu'on n'en con- fonde pas les conséquences, et qu'on ne les estende pas de l'une à l'autre. Mais si l'on tombe dans ce vice, on peut luy opposer un remède très seur et très in- faillible : c'est de substituer mentalement la défini- tion à la place du défini, et d'avoir toujours la défi- nition si présente, que tous les fois qu'on parle, par exemple, de nombre pair, on entende précisément que c'est celuy qui est divisible en deux parties égales, et que ces deux choses soient tellement jointes et inséparables dans la pensée, qu'aussitost que le discours en exprime l'une, l'esprit y attache immédiatement l'autre. Car les géomètres, et tous ceux qui agissent méthodiquement, n'imposent des noms aux choses que pour abréger le discours, et non pour diminuer ou changer l'idée des choses

��I. L'origine de cette distinction, devenue classique, est dans les Seconds Analytiques, II. 7, où Aristote distingue de la définition qui porte sur l'essence même de la chose, l'explication relative aux choses qui n'existent pas, par exemple le cerf-bouc, et qui ne fournit que la signification du discours et du mot. Il est remarquable que, se réfé- rant à la technique méthodologique de ses contemporains, Aristote soit amené à constater que les géomètres partent de définitions nominales pour établir l'existence de leur objet : i'. [i.Èy vàp ar]{xa!.'v£t xôxpÎYwvov, è'XaSsv ô yscijijLSTprj;, ôtt o'è'ai'.v Ôsîxvuatv (92^ i5). Cf. le commentaire que Pascal lui-même a donné de cette distinction dans la Lettre à Le Paillear, supra T. II, p. i85.

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