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164 ŒUVRES

Est-ce une chose indifferente de dire, qu’avec la grace suffisante on agit 1 en effet. Comment, dit ce bon homme 2 , indifferente ! C’est une heresie, c’est une heresie formelle, la necessité de la grace efficace pour agir effectivement est de foy3 . Il y a heresie à la nier.

Où en sommes-nous donc, m’escriay-je : 4 quel party dois-je donc prendre. Si je nie la grace suffisante, je suis Janséniste. Si je l’admets comme les Jésuites en sorte que la grâce efficace ne soit pas nécessaire, je seray heretique, dites-vous. Et si je l’admets comme vous en sorte que la grâce efficace soit necessaire, je peche contre le sens commun, et je suis extravagant, disent les Jesuites. Que dois-je donc faire dans cette necessité inévitable d’estre, ou extravagant, ou hérétique, ou Janseniste. Et en quels termes sommes-nous reduits, s’il n’y a que les Jansenistes qui ne se brouillent, ny avec la foy, ny avec la raison, et qui se sauvent tout ensemble de la folie et de l’erreur ?

Mon amy Janseniste prenoit ce discours à bon


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1. W. aliquid boni fieri.

2. Richelet, après avoir fait remarquer que bon homme signifie « homme de peu de mérite, de peu d’esprit, et qui n’est bon à rien », ajoute « ....Il est vrai que bon, est quelquefois appliqué à un vieillard, non point par mépris, ni pour lui faire injure : mais aussi ce n’est point pour l’honorer ; car on veut, par ce mot, faire entendre que l’âge aïant éteint les passions dans cet homme, il ne lui reste qu’une certaine bonté de peu de mérite. » D’autre part, la reine de Pologne écrivant à d’Andilly applique ce mot à Singlin (apud Hermant, Mémoires, T. V, p. 162).

3. W. catholicæ fidei caput est.

4- A 2 B. [et] quel party dois-je [icy] prendre ?