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70 ŒUVRES

M. de Rebours 1 auroit peut-estre bien la bonté de vouloir vous donner quelques avis. Cela m’a fait interrompre pour le consulter, et c’est par son ordre que je vous escris ce qu’il ne peut vous escrire luy-mesme presentement, par ce qu’il a fort mal aux yeux ; et de plus par ce que ce n’est pas, dit-il, à luy à donner conduite à personne. C’est M. Singlin qui a mission pour cela et non pas luy à ce qu’il veut croire.

Il m’a donné charge de vous dire que comme c’est une chose constante qu’une des principales et indispensables obligations d’un chef de famille est le soin qu’il doit prendre de la regler, encore qu’il soit vray que ce soin doive estre divisé, et que celuy des hommes regarde principalement le mary et celuy des filles la femme, neantmoins cela n’a pas lieu chez vous, M. Perier estant trop occupé pour s’y donner comme il faut, ce qui vous en charge sans pourtant l’en decharger, par ce que l’obligation principale doit tousjours estre preferée ; que si [vous] pouviez le porter à s’acquitter d’un devoir si important, vous en seriez quitte ; mais si cela n’est pas, vous en demeurez chargée ; ce qui vous oblige (comme vous voulez travailler à leur salut et non pas simplement à vous acquitter exterieurement de cette obligation, ce qui seroit assez aisé) à tascher premierement de les bien connoistre en les eprouvant mesme en de petites choses qui vous peuvent faire connoistre s’ils ont de la pieté ou non ; s’ils sont hypocrites ou hardis à se faire connoistre mauvais ; quels vices regnent en eux, et de quel bien ils sont plus susceptibles. Il faut aussi tascher de vous faire aimer d’eux, en ne les reprenant point aigrement, quoy qu’il

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1. M. de Rebours était l’un des confesseurs de Port-Royal ; cf. supra T. II, p. 173.