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LETTRE DE FERMAT A PASCAL


De Toloze, le 29 Août 1654.

        Monsieur,

Nos coups fourrez continuent toujours et je suis aussi bien que vous dans l’admiration de quoy nos pensées s’ajustent si exactement qu’il semble qu’elles ayent pris une mesme route et fait un mesme chemin. Vos derniers Traitez du Triangle arithmétique et de son application en sont une preuve authentique : et si mon calcul ne me trompe, votre douze[1] conséquence couroit la poste de Paris à Toloze, pendant que ma proposition des nombres figurez, qui en effet est la mesme, alloit de Toloze à Paris.

Je n’ay garde de faillir tandis que je rencontreray de cette sorte, et je suis persuadé que le vray moyen pour s’empescher de faillir est celuy de concourir avec vous. Mais si j’en disois davantage, la chose tiendroit du compliment, et nous avons banni cet ennemi des conversations douces et aisées.

Ce seroit maintenant à mon tour à vous débiter quelqu’une de mes inventions numériques ; mais la fin du Parlement augmente mes occupations, et j’ose espérer de

  1. Bossut imprime « onzième « au lieu de « douzième », et cette version est reproduite par Paul Tannery et Ch. Henry dans leur édition des Œuvres de Fermat. Il semble toutefois (quoique le mot soit peu lisible) que la copie conservée à la Bibliothèque Nationale porte : « douzième. » Vide infra, t. XI, p. 353.