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ŒUVRES

jusqu’à une certaine hauteur ; mais on n’apprit pas qu’elle s’élevast plus haut dans les lieux plus profonds. On pensoit, au contraire, qu’elle s’élevoit toûjours à la mesme hauteur, qu’elle estoit invariable en tous les lieux du monde ; et comme on ne pensoit point à la pesanteur de l’Air, on s’imagina que la nature de la Pompe est telle, qu’elle éleve l’eau à une certaine hauteur limitée, et puis plus. Aussi Galilée la considéra comme la hauteur naturelle de la Pompe, et il l’appela la Altessa limitatissima[1].

Aussi comment se fut-on imaginé que cette hauteur eust esté variable, suivant la varieté des lieux ? Certainement cela n’estoit pas vraysemblable ; et cependant cette dernière erreur mettoit encore hors d’estat de prouver que la pesanteur de l’Air est la cause de ces effets ; car comme elle est plus grande sur le pied des montagnes que sur le sommet, il est manifeste que les effets y seront plus grands à proportion.

C’est pourquoy je conclus qu’on ne pouvoit arriver à cette preuve, qu’en en faisant l’experience en deux lieux élevez, l’un au dessus de l’autre, de 400. ou 500. toises. Et je choisis pour cela la montagne du Puy de Domme en Auvergne, par la raison que j’ai declarée dans un petit Escrit que je fis imprimer dés l’année 1648. aussi tost qu’elle eust reüssi.

  1. La phrase dont est tirée cette expression se trouvait déjà citée dans une note de l’Avis au Lecteur qui précède la lettre de Petit à Chanut avec renvoi aux Dialogues I, p. 12, 17, etc. (Vide supra, t. I, p. 321, sqq.)