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ŒUVRES

adhere en aucune sorte ; au lieu qu’il tomberoit par son poids avec violence, s’il n’estoit qu’à quatre pieds avant dans l’eau, et encore plus s’il estoit tout à fait hors de l’eau. J’en ay aussi fait voir la raison, qui est que l’eau le touchant par dessous, et non pas par dessus (car elle ne touche pas la face d’en haut, parce que l’entonnoir empesche qu’elle n’y puisse arriver), elle le pousse par le costé qu’elle touche vers celuy qu’elle ne touche pas, et ainsi elle le pousse en haut et le presse contre l’entonnoir.

La mesme chose doit s’entendre de toute autre liqueur ; et par consequent si deux corps sont polis et appliquez l’un contre l’autre, en tenant celuy d’en haut avec la main, et en abandonnant celuy qui est appliqué, il doit arriver que celuy d’en bas demeure suspendu, parce que l’Air le touche par dessous, et non pas par dessus ; car il n’a point d’accés entre deux : et partant il ne peut point arriver à la face par où ils se touchent ; d’où il s’ensuit par un effet necessaire du poids de toutes les liqueurs en general, que le poids de l’Air doit pousser ce corps en haut, et le presser contre l’autre ; en sorte que si on essaye de les separer, on y sente une extréme resistance : ce qui est tout conforme à l’effet du poids de l’eau.

D’où l’on voit que la difficulté de separer deux corps polis, n’est qu’un cas particulier de la regle generale de l’impulsion de toutes les liqueurs en general contre un corps qu’elles touchent par une de ses faces, et non pas par celle qui luy est opposée.