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Peut-être est-ce à ce chagrin particulier que je dois attribuer le ton grave, la couleur sombre, l’amère inquiétude qui dominent dans cet écrit ? On conviendra du moins que cette teinte générale est assez en harmonie avec le tableau politique du jour, et suffisamment justifiée par les chances désastreuses en ce moment suspendues sur la patrie.

La littérature des peuples est l’expression de chaque époque de leur existence ; elle doit subir leurs révolutions, et changer comme leurs mœurs, leurs gouvernemens ou leurs croyances religieuses ; si elle demeurait stationnaire, elle manquerait de vérité ; ceci s’applique plus particulièrement à la poésie. Les Corbiéréide, les Villéliade, les Peyronnéide, etc., etc., marquées à la fois de sévérité et de ridicule, étaient analogues au caractère sinistre et comique des Villèle, des Corbière et des Peyronnet. Le génie absolument terne du ministère actuel appelle une satire plus noire, plus acre, plus bilieuse ; elle doit être aujourd’hui comme un écho de l’anathème populaire.

Tenter d’ébranler ce colosse avec des épigrammes et des chansons, ce serait la même chose que si l’on voulait démolir d’épaisses fortifications avec des décharges de mousqueterie et sans employer le gros canon. Si, dans la crise où nous sommes, on se contentait de persiffler ou de chansonner le pouvoir, on finirait par jus-