Page:Œuvres de Barthélemy et Méry, tome 3, 1831.djvu/30

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L’alexandrin a été accusé de monotonie, et il faut convenir que beaucoup de poètes ont contribué à justifier l’accusation en le chargeant de rimes pauvres, sèches et parasites ; et pourtant ce vers, manié par un homme habile, a tant de souplesse et d’élasticité, qu’il se prête à tous les genres, à tous les tons ; aussi léger, aussi gracieux que le vers de dix pieds, il peut s’élever jusqu’à la majestueuse simplicité de l’hexamètre latin. Le rhythme, monotone par excellence, est celui des octaves italiennes, à cinq voyelles finales, ou des strophes anglaises hérissées de consonnes : nous n’avons jamais songé à les attaquer.

    que notre siècle n’est plus ni peintre ni musicien : la direction grave imprimée vers les études sérieuses, loin de nuire aux arts l’agrément et d’imagination, ne fera que les rendre plus nécessaires, en France surtout. Chez nous, on est volontiers métaphysicien, philosophe, mais on aime à descendre des hauteurs de la pensée pour aller au salon ou à l’opéra, et pour lire des vers, s’ils sont bons. Si c’est à des résultats positifs qu’on juge de la faveur accordée à un art, jamais siècle ne fut au contraire plus poétique que le nôtre. Tous nos grands poètes sont sur le chemin de la fortune, non pas avec les doute cents livres de M. Colbert, mais grâces à la généreuse protection du public ; ministre bien plus riche et bien plus puissant. Le siècle anti-poétique était celui où le libraire Barbin disait : « M. Despréaux, votre Lutrin s’enlève ; nous en vendrons cinq cents exemplaires, s’il plaît à Dieu. ».