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distinguer votre auguste sang d’avec le vil sang des autres. Au surplus je n’ai pas rendu la distinction bien difficile à faire : ce n’est pas même un enfant noble ; c’est le fils d’un misérable esclave que vous voyez à côté du vôtre : ainsi la différence est si énorme entr’eux, que votre pénétration va se jouer de cette foible épreuve où je la mets.

THÉODOSE.

Ah ! le malin vieillard !

THÉOPHILE.

Au reste, Seigneur, ajouta-t-il, je me suis ménagé un moyen sûr de reconnoître votre fils ; il n’est point confondu pour moi : mais s’il l’est pour vous, je vous avertis que rien ne m’engagera à vous le montrer, à moins que le Roi ne me l’ordonne. Seigneur, dit alors le Prince à son pere, d’un air un peu confus & presque la larme à l’œil, ordonnez-lui donc qu’il me le rende. Moi, Prince, lui répartit le Roi ; faites-vous réflexion à ce que vous me demandez ? est-ce que la nature n’a point marqué votre fils ? Si rien ne vous l’indique ici, si vous ne pouvez le retrouver sans que je m’en mêle, eh ! que deviendra l’opinion superbe que vous avez de votre sang ? Il faudra donc renoncer à croire qu’il est d’une autre sorte