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rengs avec le couvre-chief, le lieu où il se doibt tenir, et ce

qu’il en doibt faire.

Après ce que les dames seront montées en leur chauffault, le chevalier (ou escuier) d’onneur, doibt venir sur les rengs avecques les juges, au jour du Tournoy, armé de toutes pièces, le heaulme tymbré en la teste, et son cheval en couverte de ses armes, prest pour tournoyer, la masse ou l’espée pendue à la selle, portant la lance où est atachié ledit couvrechief, et en tel estat viendra le premier entre le Roy d’armes et les juges, ou entre les deux premiers juges, lesquels doivent venir une demye heure premièrement que les tournoyeurs, en l’estat, forme et manière qu’ils ont fait leur entrée en la ville, avec trompettes sonnans, et doyevent entrer dedans les lices, et tournoyer ung tour ou deux, pour veoir se les cordes sont bien et pour ordonner ceulx qui les coupperont ; et alors laisseront entre les deux cordes le chevalier (ou escuier) d’onneur, accompaigné de quatre ou six varletz à cheval, et autant à pied, ou ainsi qu’il vouldra ; et lui doyevent lesdits quatre juges diseurs de leurs propres mains lever le heaulme hors de la teste, et le bailler au Roy d’armes qui le portera devant eulx jusques au chaulffault des dames, et illec les juges diseurs le bailleront aux dames ; puis sera dit par le Roy d’armes :

Mes très redoubtées et honnorées dames et

damoiselles, véez là vostre humble serviteur et chevalier (ou escuier) d’onneur qui s’est rendu sur les rengs prest pour faire ce que lui avez commandé, duquel véez cy le timbre que vous ferez garder dedans vostre chauffault, s’il vous

plaist.

Lors ung gentil homme ou honneste varlet ad ce depputé, ou dit chauffault des dames prendra ledit timbre et le mettra sur ung tronson de lance de la haulteur d’ung homme, ou d’ung pou plus, et le tendra en sa main entre les dames, pendant dehors, tellement que chascun le puisse veoir tant comme le Tournoy durera.

Et cela fait, les juges prandront congié, et s’en iront en leur chauffault,et ledit chevalier (ou escuier) d’onneur se tindra entre les cordes, soy pourmenant avec ses gens, jusques ad ce que

les tournoyeurs viendront.

Une heure davant que le seigneur appellant doye entrer ès lices, il doibt envoyer sonner ses trompettes par la ville, à cheval, pour recueillir ceulx qui ont esté partis de son cousté, ausquels fera assavoir par lesdites trompettes, qu’ils se rendent en la rue davant son haberge ou autre lieu, près d’ilec, qui par ledit seigneur sera advisé ; et où sera son pannon pour eulx y assembler, ad ce que tous ensemble ils puissent venir sur les rengs.

Et pareillement le fera faire le seigneur deffendant davant l’eure qu’il devra venir sur les rengs.

Au matin jour dudit Tournoy, chascun desdits chevaliers et escuiers tournoyans, tant bannerez que autres, feront davant l’eure de disner ce que plus leur sera neccessaire ; et aussi prandront leur repos se bon leur semble ; car depuis que dix heures seront passées, ils n’auront loisir ne temps de rien faire, fors seulement d’eulx armer et mettre en point pour tournoyer, et par façon que au plus tard à heure de unze heures ils se puissent trouver tous prestz et en armes sur les destriers, partans hors de leurs logies, pour eulx rendre davant la haberge de leur chief, et, avec lequel ils devront pour ce jour là tournoyer, à l’eure que les héraulx et poursuivans crieront. Car ausdites unze heures, iceulx héraulx et poursuivans seront tenus d’aler crier par davant les haberges des tournoyeurs à haulte voix : "Lassez, lassez heaulmes, lassez heaulmes, seigneurs chevaliers et escuiers, lassez, lassez, lassez heaulmes et yssiez hors bannières pour convoyer la bannière du chief." Lors chascun des tournoyeurs sauldra en la rue tout prest, et ira à cheval davant le haberge du chief, ou ailleurs en quelque place de la rue plus large, qui aura esté advisée, comme dit est, par le chief, pour convoyer sa bannière, et faire assembler ses tournoyeurs.

NOTA Que en Flandres, Brabant et ses autres basses marches, où ils font voulentiers Tournoys, ils ont de coustume que les Roys d’armes, héraulx et poursuivans portent les bannières ; et sont tenus les tournoyeurs dont les héraulx et poursuivans ont les bannières, leur bailler une cotte de leurs armes avec ung cheval grant et fort en couverte, pour porter la bannière, et pour le corps desdits hérault ou poursuivant, baillent ung haubergon à qui le veuilt, avec sallade, garde-bras, avant-bras, gantelez et harnois de jambes. Mais ès haultes Almaignes et sur le Rin, ne le font en ceste façon ; car les bannières des tournoyeurs sont portées par beaulx compaignons, jeunes, habillés à la guerre, et de plus à cheval ; lesquels sont communément armez d’escrevisses ou de harnoys blancs, de sallades ou chappeaulx de fer bien emplumés, et de harnois de jambes ; et ont dessus leurs habillemens belles hucques d’orfaverie, ou de la divise de leur maistre. Et sont montez sur chevaulx presque aussi puissans comme les tournoyeurs ; lesdits chevaulx couvers bien richement ou gentement. Et tousjours sont lesdits compaignons à la queue des destriers de leurs maistres, et jamais ne laissent encliner leurs bannières, ne aussi ne perdent leursdits maistres en la presse. Laquelle façon je priseroys trop mieulx que celle de Flandres, ou de Brabant, car maintenant en France a tant de héraulx et de poursuivans mal habillez, que quant ils se trouveroient armez et les bannières en la main, ils seroient si empeschez, qu’ils laisseroient cheoir leurs bannières, ou ne sauroient poursuir leur maistre : laquelle chose pourroit tourner à grant inconvenient ou deshonneur à leurs maistres.

Item, et alors que lesdits tournoyeurs seront tous arrivez et assemblez ensemble, viendra le seigneur appellant ou lieu où ils seront, avec lequel ils chevaucheront-tous ensemble jusques davant les lices, en l’ordre et par la forme et manière que cy après s’ensuit.

C’est assavoir, que avec eulx auront Roys d’armes, héraulx ou poursuivans, grant nombre de trompettes et menestrelz sonants ; et sera le pannon du seigneur appellant porté le premier devant lui par quelcun, comme dessus est dit. Aprés ledit pannon, ira le chief appellant, et à la queue de son destrier sera cellui qui portera sa bannière. Et après lui deux bannerez de front