Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/513

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été donnée. Aussi, dès qu’il fut devenu l’opprobre de toutes les mères, craignant que ses déportements vous restassent inconnus, il eut l’audace de vous confesser un adultère, et votre aspect ne le fit pas même rougir. Tu peux vivre comme il te plaît, Salluste, et faire tout ce que tu voudras ; mais qu’il te suffise de n’avoir que toi seul pour complice de tes crimes, et ne nous fais pas un reproche de notre insouciance et de notre léthargie. Quelque attentifs que nous soyons à veiller sur la chasteté de nos épouses, nous ne le sommes point encore assez pour que tu ne puisses nous surprendre ; toutes nos précautions cèdent devant ton audace : qui pourrait, en effet, retenir celui qui n’a pas eu honte de confesser en plein sénat un adultère ?

VI. Si, dédaignant de te répondre sur ce qui me concerne, je me bornais à lire devant le monde cette sentence si flétrissante que rendirent si légalement contre toi App. Claudius et L. Pison, ces deux censeurs, les plus intègres de tous les hommes, ne te semblerait-il pas que je veux imprimer sur ton front des taches que, dans tout le reste de ta vie, tu ne parviendras point à effacer ! Après ton exclusion du sénat, on ne t’a plus revu ; sans doute tu t’étais réfugié dans ce camp où avait reflué toute la sentine de la république. Mais ce Salluste qui, pendant la paix, ne sut point conserver sa place au sénat, parvint, lorsque la république, asservie par les armes, vit des bannis reparaître en vainqueurs, à y arriver après une nouvelle questure. Durant l’exercice de cet emploi, tout ce qui pouvait trouver un acheteur était vénal pour lui ; tout lui paraissait juste et légitime, pourvu que tout allât au gré de ses désirs.