Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/508

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postérité. Si c’est à ces hauts faits qu’ils doivent leur gloire immortelle, pourquoi de belles actions et une vie sans tache ne nous donneraient-elles pas le même privilége ? Ne dirait-on pas à t’entendre, Salluste, que tu descends de ces grands hommes ? Ah ! s’il en était ainsi, il est des gens qui auraient à rougir de ton infamie. Moi, j’ai par mes vertus jeté l’éclat sur le nom de mes pères, et, si avant moi ils n’étaient point encore connus, ils reçoivent de moi un commencement d’illustration(1). Mais, toi, Salluste, tu as par une vie dépravée enveloppé tes ancêtres dans d’épaisses ténèbres, et, supposé qu’ils aient été d’éminents personnages, on les aurait bien certainement vus tomber, grâce à toi, dans un profond oubli. Cesse donc de m’opposer des noms antiques : il me suffit de briller plutôt par mes actions que par ma naissance, et d’avoir vécu de telle sorte, que je serve d’exemple à mes derniers neveux, qui trouveront en moi le premier degré de leur noblesse. Au reste, il ne me convient pas, pères conscrits, de me mettre en parallèle avec ceux qui ne sont plus : les traits de l’envie et de la haine ne sauraient les atteindre(2) ; toutefois je peux être comparé à ceux que j’ai eus pour collègues dans les différentes fonctions où la république m’a appelé. Mais, si j’eusse, en cherchant les honneurs, poussé trop loin l’ambition (je n’entends point parler de cette ambition patriotique dont je fais profession, mais de cette ambition dangereuse et proscrite par nos lois dont Salluste s’est proclamé le soutien), et si, dans l’exercice de mes charges, j’eusse été ou trop sévère à punir les méchants, ou trop ardent à veiller au salut de l’État (ce que tu nommes, Salluste, un régime de proscription), j’ai lieu de