Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/505

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cuté les hauts faits dont tu te glorifies, et comme si entre ta tyrannie et celle du dictateur Sylla il y avait eu d’autre différence que le nom.

Que me reste-t-il donc à dire encore de l’insolence d’un homme auquel Minerve elle-même a enseigné tous les arts, d’un homme que Jupiter a reçu dans l’assemblée des dieux, et que l’Italie entière, au retour de l’exil, a porté sur ses épaules ?

Dis-nous, je t’en conjure, Romulus d’Arpinum, toi qui surpasses en génie les Paul, les Scipion, les Fabius, quelle est la plaie que tu occupes enfin dans cette cité, quel parti tu as embrassé, qui tu as pour ami ou pour ennemi ? N’es-tu pas l’esclave de celui contre lequel tu as conspiré dans cette ville même ? Comment, depuis ton exil à Dyrrachium, es-tu devenu son protégé ? Tu favorises aujourd’hui l’ambition de ceux que tu nommais naguère des tyrans ; tu traites de factieux et d’insensés ceux qui te semblaient être les premiers de l’État ; tu plaides la cause de Vatinius, et Sextius a perdu ton estime ; tu lances sur Bibulus les traits les plus mordants, et tu fais le panégyrique de César ; tu es le plus zélé partisan de celui que tu méprisais le plus. Ta manière de voir varie selon que tu es assis ou debout ; tu médis de celui-ci, tu accables celui-là de ton mépris ; transfuge inconstant, tu trahis tantôt un parti, tantôt un autre.