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la volonté du peuple [1]. « Napoléon avait tort de se faire ainsi l’apologiste des empereurs, et d’y chercher comme une origine et une justification ; par le génie, par la gloire, par le malheur noblement supporté, il est autant au-dessus d’eux qu’à d’autres égards il en diffère profondément : quoi qu’il en soit, d’après ce que nous venons de rapporter, on peut croire que la supériorité donnée à Salluste sur Tacite par le critique officiel n’était peut-être pas entièrement désintéressée, et qu’un sentiment autre que celui du goût, s’il ne dictait son jugement, pouvait cependant l’altérer. »

De nos jours, Tacite n’est guère plus heureux ; il vient de rencontrer un nouveau et éminent contradicteur, qui est en même temps un partisan de Salluste.

« La littérature latine ne possède aucun ouvrage qui renferme, sur l’état politique des Romains, les lumières qu’Aristote nous a données sur la république de Sparte, et Xenophon sur la république d’Athènes. Tacite est de tous les auteurs celui sur lequel on pourrait le plus compter, à cause de la trempe de son esprit sévèrement critique. L’entrée en matière de ses Annales fait espérer d’utiles révélations ; en quelques mots profonds et rapides, il montre le monde fatigué des guerres civiles, un besoin général de repos et de sécurité ; Auguste, maître de l’armée par ses largesses, du peuple par ses distributions, des nobles par ses faveurs, de tous par la douce tranquillité de son gouvernement ; enfin ; la république s’effacant peu à peu du souvenir d’une société qui sous son sceptre protecteur, goûtait un repos dont elle avait été si longtemps privée. Ce tableau est d’une touche admirable. Il fait espérer que l’auteur, s’élevant à d’autres perspectives, éclairera de quelques traits lumineux les causes de cette décadence. Mais, il faut le dire, Tacite trompe ici notre attente. En général, Tacite, qui pénètre si avant

  1. Précis sur les guerres civiles de Jules César, par Napoléon.