Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/349

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miner à fond combien cet objet est important, afin que, distinguant les inconvénients d’avec les avantages, vous arriviez, par un large chemin, au véritable but. Je pense, puisque tout ce qui a commencé doit finir, qu’au temps marqué pour la ruine de Rome les citoyens en viendront aux mains avec les citoyens ; qu’ainsi fatigués, épuisés, ils seront la proie de quelque roi, de quelque nation (33) : autrement, le monde entier ni tous les peuples conjurés ne pourraient ébranler, encore moins renverser cet empire. Il faut donc consolider tous les éléments d’union et bannir les maux de la discorde.

Vous aurez atteint ce double but, si vous arrêtez la licence des profusions et des rapines (34), non point en rappelant d’antiques institutions (35) que nos mœurs corrompues rendent pour nous depuis longtemps ridicules, mais en faisant du patrimoine de chacun la limite invariable de sa dépense : car il est passé en usage chez nos jeunes gens de commencer par dissiper leur bien et celui des autres ; pour vertu suprême, ils excellent à ne rien refuser à leurs passions et à quiconque les sollicite, traitant de bassesse la pudeur et l’économie. Aussi à peine ces esprits ardents, engagés dans une mauvaise route, voient-ils manquer leurs ressources ordinaires, qu’ils se portent avec violence, tantôt contre nos alliés, tantôt contre les citoyens, renversent l’ordre établi, et font leur fortune aux dépens de celle de l’État.

Il est donc urgent d’abolir l’usure pour l’avenir (36), afin que chacun remette de l’ordre dans ses affaires. Voilà le vrai remède