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CONJURATION DE CATILINA

je m’en voyais écarté. C’est par ce motif que, prenant un parti assez honorable dans ma disgrâce, j’ai embrassé l’espoir de conserver ce qui me restait de dignité. Je me proposais de vous en écrire davantage, mais l’on m’annonce qu’on prépare contre moi les dernières violences. Je n’ai que le temps de vous recommander Orestilla, et je la confie à votre foi. Protégez-la contre l’oppression, je vous en supplie par vos enfants. Adieu ».

XXXVI. Catilina s’arrêta quelques jours chez C. Flaminius Flamma, sur le territoire d’Arretium, pour distribuer des armes à tout le voisinage, déjà préparé à la révolte ; puis, avec les faisceaux et les autres insignes du commandement, il se rendit au camp de Mallius. Dès qu’on en fut instruit à Rome, le sénat déclare (83) « Catilina et Mallius ennemis de la république : à la foule de leurs partisans, il fixe le jour avant lequel ils pourront, en toute sûreté, mettre bas les armes ; il n’excepte que les condamnés pour crime capital. » On décrète en outre « que les consuls feront des levées ; qu’Antoine, à la tête de l’armée, se mettra sans délai à la poursuite de Catilina, et que Cicéron restera à la défense de la ville ». Combien dans cette conjoncture l’empire romain me parut digne de compassion ! Du levant au couchant toute la terre soumise par ses armes lui obéissait ; au dedans, on avait à souhait paix et richesses, les premiers des biens aux yeux des mortels ; et cependant des citoyens s’obstinaient à se perdre, eux et la république ; car, malgré les deux décrets du sénat, il ne se trouva pas un seul homme, dans une si grande multitude, que l’appât de la récompense déterminât