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CONJURATION DE CATILINA

l’autre, tandis que nous n’avons nulle part un foyer domestique ? Ils ont beau acheter tableaux, statues, vases précieux, élever pour abattre, puis reconstruire après, enfin prodiguer, tourmenter leur or de mille manières, jamais, en dépit de leurs extravagances, ils ne peuvent triompher de leurs trésors. Et pour nous, misère à la maison, dettes au dehors, embarras présent, perspective plus affreuse encore. Que nous reste-t-il enfin, sinon le misérable souffle qui nous anime ? Que ne sortez-vous donc de votre léthargie ? La voilà, la voilà, cette liberté que vous avez si souvent désirée : avec elle les richesses, la considération, la gloire, sont devant vos yeux, toutes récompenses que la fortune réserve aux vainqueurs. L’entreprise elle-même, l’occasion, vos périls, votre détresse, les magnifiques dépouilles de la guerre, tout, bien plus que mes paroles, doit exciter votre courage. Général ou soldat, disposez de moi : ni ma tête ni mon bras ne vous fera faute. Tels sont les projets que, consul, j’accomplirai, j’espère, avec vous, à moins que ma confiance ne m’abuse, et que vous ne soyez plus disposés à obéir qu’à commander. »

XXI. Après avoir entendu ce discours, ces hommes qui, avec tous maux en abondance, n’avaient ni bien ni espérance aucune, et pour qui c’était déjà un grand avantage de troubler la paix publique, ne se mettent pas moins la plupart à demander à Catilina quel était son but, quelles seraient les chances de la guerre, le prix de leurs services, et quelles étaient partout les forces et les espérances du parti. Alors Catilina leur promet l’abolition des dettes, la proscription des riches, les