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SALLUSTE.

candidature au consulat, faute d’avoir pu se mettre sur les rangs dans le délai fixé par la loi. Il y avait alors à Rome un jeune noble, Cn. Pison (41), d’une audace sans frein, plongé dans l’indigence, factieux et poussé au bouleversement de l’État autant par sa détresse que par sa perversité naturelle. Ce fut à lui que, vers les nones de décembre (42), Catilina et Autronius s’ouvrirent du dessein qu’ils avaient formé d’assassiner dans le Capitole, aux calendes de janvier (43), les consuls L. Cotta et L. Torquatus. Eux devaient prendre les faisceaux, et envoyer Pison avec une armée pour se rendre maître des deux Espagnes. Ce complot découvert, les conjurés remirent leur projet de massacre aux nones de février (44) : car ce n’étaient pas seulement les consuls, c’étaient presque tous les sénateurs que menaçaient leurs poignards. Si, à la porte du sénat, Catilina ne s’était trop hâté de donner le signal à ses complices, ce jour eût vu se consommer le pire forfait qui se fût encore commis depuis la fondation de Rome. Mais, comme il ne se trouva pas assez de conjurés avec des armes, cette circonstance fit échouer le projet.

XIX. Plus tard Pison, nommé à la questure, fut envoyé avec le titre de propréteur dans l’Espagne citérieure, par le crédit de Crassus, qui le savait ennemi de Pompée. Le sénat, d’ailleurs, lui avait sans peine accordé une province ; d’un autre côté, il était bien aise d’écarter du sein de la république un homme taré ; d’une autre part, les gens de bien (45) se flattaient généralement de trouver en lui un appui ; car déjà la puissance de Cn. Pompée commençait à paraître redoutable. Mais, dans sa