Salluste veut parler ici des Gracques, qui étaient de famille patricienne, et tenaient à la noblesse par leurs alliances et par les charges curules dont leurs ancêtres avaient constamment été revêtus depuis la seconde guerre punique. Cette réflexion si politique et si profonde de notre historien a rappelé à M. Burnouf un des plus beaux traits oratoires de Mirabeau. On sait que cet orateur avait répudié sa noblesse pour être élu député du tiers-état. « Dans tous les pays, dans tous les âges, a-t -il dit dans un discours adressé au tiers-état de Provence, les aristocrates ont implacablement poursuivi les amis du peuple ; et si, par je ne sais quelle combinaison de la fortune, il s’en est élevé quelqu’un dans leur sein (ex nobililate), c’est celui-là surtout qu’ils ont frappé, avides qu’ils étaient d’inspirer la terreur par le choix de la victime. Ainsi périt le dernier des Gracques de la main des patriciens ; mais, atteint du coup mortel, il lança de la poussière vers le ciel en attestant les dieux vengeurs, et de cette poussière naquit Marius. »
Placés entre la noblesse et le peuple, les chevaliers romains étaient trop ambitieux pour se contenter de ce rang intermédiaire ; aussi penchaient-ils toujours pour l’ordre sénatorial. C . Gracchus, par la loi Sempronia, les mit en désaccord avec le sénat en leur conférant le pouvoir judiciaire.
Après avoir fait passer la loi Agraire, Tiberius fit nommer trois commissaires pour le partage des terres : c’étaient C. Grachus son frère, Appius Claudius son beau-père, et Tiberius lui-même.
Ici, Salluste relève, avec une impartialité méritoire dans un ennemi de la noblesse, ce qu’il put y avoir de blâmable dans la conduite de C. Gracchus. Le président de Brosses, pour appuyer l’opinion de son auteur, cite à ce sujet une lettre de Cornélie à Caïus son fils, qui prouve combien elle était loin d’approuver ses desseins. Un seul pas-