Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/134

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roux contre Nabdalsa, de peur d’exciter une sédition. Mais, depuis ce temps, il n’y eut plus de repos pour Jugurtha, ni le jour ni la nuit : en tel lieu, avec telle personne et à telle heure que ce fût, il ne se croyait plus en sûreté, craignant ses sujets à l’égal de ses ennemis, épiant tout ce qui l’environnait, s’épouvantant au moindre bruit, couchant la nuit tantôt dans un lieu, tantôt dans un autre, au mépris des bienséances du trône. Quelquefois il s’éveillait en sursaut, saisissait ses armes, et poussait des cris : les terreurs dont il était obsédé allaient jusqu’à la démence (86).

LXXIII. A peine instruit, par des transfuges, de la triste fin de Bomilcar et de la découverte de la conspiration, Metellus se hâte de faire ses préparatifs comme pour une guerre toute nouvelle. Marius ne cessait de l’importuner pour son congé : Metellus, ne pouvant attendre de grands services d’un questeur qu’il n’aimait pas, et qu’il avait offensé, le laisse enfin partir (87). A Rome, le peuple, ayant eu connaissance des lettres concernant Metellus et Marius, avait reçu volontiers l’opinion qu’elles exprimaient sur l’un et sur l’autre. La noblesse du proconsul n’était plus, pour lui un titre d’honneur, comme naguère, mais de réprobation ; et la basse naissance du questeur était un titre de plus à la faveur populaire. Du reste, à l’égard de l’un et de l’autre, l’esprit de parti influa beaucoup plus que la considération des bonnes ou des mauvaises qualités. Cependant des magistrats factieux ne cessent d’agiter la multitude. Dans tous les groupes, ils accusent Metellus de haute trahison, et préconisent outre mesure le mérite de Marius. Enfin, ils échauffent tellement l’esprit de la populace, que les artisans, les labou-