Page:Œuvres complètes de Salluste (trad. Durozoir), 1865.djvu/106

Cette page n’a pas encore été corrigée

Par un édit, il fit d’abord disparaître ce qui entretenait la mollesse, prohiba dans le camp la vente du pain ou de tout autre aliment cuit (39), défendit aux valets de suivre l’armée, aux simples soldats d’avoir, dans les campements ou dans les marches, des esclaves ou des bêtes de somme. Quant aux autres désordres, il y mit un frein par l’adresse. Chaque jour, prenant des routes détournées, il levait son camp, qu’il faisait, comme en présence de l’ennemi, entourer d’une palissade et d’un fossé, multipliant les postes et les visitant lui-même avec ses lieutenants. Dans les marches, il se plaçait tantôt à la tête, tantôt en arrière, quelquefois au centre, afin que personne ne quittât son rang, qu’on se tînt serré autour de ses drapeaux, et que le soldat portât lui-même ses vivres et ses armes (40). C’est ainsi qu’en prévenant les fautes, plutôt qu’en les punissant, le consul eut bientôt rétabli la discipline de l’armée.

XLVI. Informé par ses émissaires des mesures que prenait Metellus, dont à Rome il avait pu par lui-même apprécier l’incorruptible vertu, Jugurtha commence à se défier de sa fortune, et cette fois, enfin, il s’efforce d’obtenir la paix par une véritable soumission. Il envoie au consul des ambassadeurs dans l’appareil de suppliants (41), et qui ne demandent que la vie sauve pour lui et pour ses enfants ; sur tout le reste il se remet à la discrétion du peuple romain. Metellus connaissait déjà, par expérience, la perfidie des Numides, la mobilité de leur caractère et leur amour pour le changement. Il prend donc en particulier chacun des ambassadeurs, les sonde adroitement, et, les trouvant dans des dispositions favorables à ses vues, il leur