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et Flora, obtiennent des autels.[1] Et la preuve que les Romains ont inventé les noms qu’ils ont déifiés, c’est qu’ils comptent parmi leurs divinités un certain Viduus qui, en séparant l’âme du corps, rend celui-ci veuf ; dieu malencontreux qu’ils relèguent hors des murs, lui faisant son procès, plutôt qu’ils ne lui rendent hommage. Ils ont aussi leur dieu Scanus, ou des degrés, Forculus (aforibus), des postes, Limentinus (a limine), du seuil de la porte, leur déesse Cardea (a cardinibus), des gonds, Orbana (ab orbitatibus), des pertes de parents. Voilà les dieux que Rome adore. On nous parle encore de Mars de Thrace, de Jupiter en Crète, de Junon honorée à Argos, à Samos, à Carthage, de Diane en Tauride, de la mère des dieux qui avait son temple sur le mont Ida, des monstrueuses divinités de l’Égypte. Pour peu qu’ils eussent eu de pouvoir, ils auraient sauvé et leur pays et leurs propres autels. Énée fuyant en Italie y porte avec lui ses pénates vaincus. Nous avons une Vénus chauve.[2] Lequel était plus déshonorant pour elle, ou d’être dépouillée de ses cheveux ou de s’être laissé blesser par Diomède dans Homère ?

Quant à la prospérité des empires, c’est la fortune plutôt que le mérite qui la détermine.

Avant la domination romaine, nous comptons l’empire des Assyriens, des Mèdes, des Perses, des Grecs, des Égyptiens ; les révolutions humaine amè-

  1. Cicéron : Amor, dolus, metus, labor, invidentia, fatum, senectus, mors, tenebroe, miseria, querela, gratia, fraus, pertinacia, Parcoe, Hesperides, somnia : quos omnes erebo et nocte natos ferunt : aut igitur haec monstra probanda sunt, aut primo tollenda. (De Nat. Deor., lib. iii
  2. Urbe a Gallis capta, obsessi in Capitolio Romani cum ex mulierum capillis tormenta fecissent, oedem Veneri calvoe consecraverunt. (Lactant., lib. i, c. 20.)