Page:Œuvres complètes de Plutarque - Œuvres morales et œuvres diverses, tome 2, 1870.djvu/646

Cette page n’a pas encore été corrigée

vous apprendre quelque chose de ce qui s'y passe, remettez les gens à une autre fois ; refusez d'écouter les propos tenus sur votre compte. Œdipe fut plongé dans les plus grands malheurs par la curiosité. Ce fut en cherchant à savoir à quelle contrée étrangère il appartenait, puisqu'il n'était pas de Corinthe, qu'il rencontra Laïus, qu'il le tua, qu'il épousa sa propre mère en montant avec elle sur le trône. Dans une situation en apparence si fortunée il veut encore savoir qui il est. Malgré l'opposition de la reine il n'en presse que davantage le vieillard qui possède ce secret, le contraignant de force à le lui révéler. À la fin, comme déjà les explications le mettent sur la voie, et que le vieillard s'écrie : « Malheur ! Je vais vous dire un terrible secret », emporté, malgré tout, par sa passion et palpitant d'impatience, Œdipe lui répond : « N'importe, il faut l'entendre. Allons ! me voilà prêt ». Tant est à la fois amère, douce et irrésistible cette demangeaison de la curiosité ! Il semble que ce soit un ulcère, que l'on fait saigner à mesure qu'on le frotte. Mais l'homme qui s'est délivré de cette maladie et qui est calme par nature, pourra dire, lorsqu'il aura ignoré une nouvelle fâcheuse : « Heureux oubli des maux, que je te trouve sage ! »

[15] C'est pourquoi il est encore une habitude que vous devez prendre. Quand une lettre vous est apportée, ne mettez point d'empressement et de précipitation à l'ouvrir, comme font presque tous les hommes, qui coupent les attaches avec leurs dents si les mains sont trop lentes. Lorsqu'un messager vient de quelque endroit ne courez pas au-devant de lui, ne vous élancez pas. Lorsqu'un ami vous