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suis d’avis que le mieux est de rester en repos ; car, pour la prière des Lacédémoniens, je ne pense pas que tu veuilles en user : ton exaltation, c’est le nom le plus honnête de la folie, s’y oppose. Il faut donc attendre jusqu’à ce qu’on sache comment il faut se comporter à l’égard des dieux et des hommes.

ALCIBIADE

XIV. — Alors, quand viendra ce temps, Socrate, et quel sera celui qui m’instruira ? Je sens que j’aurais le plus grand plaisir à voir quel est cet homme.

SOCRATE

C’est un homme qui s’intéresse à toi. Mais je pense que, comme Athéna, au dire d’Homère, écarta le brouillard qui couvrait les yeux de Diomède,


« afin qu’il reconnût bien s’il avait affaire à un dieu ou à un homme 11, »


il faut de même écarter d’abord le brouillard qui couvre à présent ton âme, après quoi l’on te donnera les moyens de distinguer le bien du mal ; car maintenant tu ne me parais pas en être capable.

ALCIBIADE

Qu’il écarte, s’il veut, ce brouillard ou toute autre chose qu’il lui plaira ; car je suis prêt à obéir sans réserve à tous les commandements de cet homme, quel qu’il puisse être, pourvu qu’il me rende meilleur.

SOCRATE

Mais lui-même professe aussi pour toi un zèle merveilleux.

ALCIBIADE

Je crois donc qu’il vaut mieux remettre jusque-là mon sacrifice.

SOCRATE

Et tu as raison ; car cela est plus sûr que de courir un si gros risque.