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de tous les Léontins le plus capable de traiter des affaires publiques, s’est fait dans l’assemblée du peuple une réputation d’excellent orateur et en même temps, par ses séances privées et ses leçons aux jeunes gens, il a gagné de grosses sommes sur notre ville. Veux-tu un autre exemple ? Notre célèbre ami Prodicos a été souvent député par son pays en divers endroits et en dernier lieu il est venu ici, il n’y a pas longtemps, comme ambassadeur de Kéos. Or il a parlé devant le sénat avec de grands applaudissements et en même temps il a donné des auditions privées et des leçons aux jeunes gens, et gagné ainsi des sommes fabuleuses. Parmi les anciens sages au contraire, aucun n’a jamais cru devoir exiger de l’argent pour prix de ses leçons, ni faire étalage de sa science devant toute sorte de gens, tant ils étaient simples et ignoraient quelle valeur a l’argent ! Au contraire, chacun des deux sophistes que j’ai nommés a tiré plus d’argent de sa science que tout autre artisan de son art, quel qu’il soit, et de même Protagoras avant eux.

HIPPIAS

III. Je vois bien, Socrate, que tu n’as aucune idée des beaux profits de notre métier ; car si tu savais combien je me suis fait d’argent, moi qui te parle, tu serais bien étonné. Je me bornerai à un seul exemple. Un jour je m’étais rendu en Sicile, alors que Protagoras s’y trouvait et qu’il était en pleine vogue et déjà assez âgé ; bien que je fusse beaucoup plus jeune que lui, en un rien de temps je me fis plus de cent cinquante mines et plus de vingt dans une seule minuscule localité, Inycos. Quand je fus de retour chez moi avec cette somme, je la donnai à mon père, et lui et tous mes concitoyens en demeurèrent surpris et émerveillés. Et je suis à peu près sûr que je me suis fait plus d’argent que deux sophistes pris ensemble à ton choix.

SOCRATE

Voilà certes un bel exemple, Hippias, et qui prouve nettement combien ta science et celle de nos conte