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l’avons reconnu précédemment, vous le rappelez-vous ?

— Parfaitement, dirent-ils tous deux.

— Eh bien, maintenant, Lysis et Ménexène, nous avons fort bien trouvé qui est ami et qui ne l’est pas. Nous disons en effet, qu’il s’agisse de l’âme, ou du corps, ou de toute autre chose, que ce qui n’est ni bon ni mauvais devient l’ami du bon à cause de la présence du mal. »

Ils acquiescèrent tous deux et convinrent que c’était bien cela.

XV. — Moi-même j’étais alors tout joyeux, comme un chasseur qui tient enfin, et non sans peine, le gibier qu’il poursuivait ; puis il me vint je ne sais d’où le plus étrange soupçon sur l’exactitude de nos conclusions. Je m’écriai aussitôt, tout contristé : « Oh ! Lysis et Ménexène, nous pourrions bien n’avoir fait qu’un beau rêve.

— Et la raison ? dit Ménexène.

— Je crains, répondis-je, que dans notre recherche de l’ami nous n’ayons rencontré des charlatans, je veux dire des raisonnements trompeurs.

— Comment cela ? dit-il.

— Voici, dis-je. Quand on est ami, l’est-on de quelque chose ou non ?

— De quelque chose nécessairement, dit-il.

— L’est-on en vue de rien et à cause de rien, ou en vue de quelque chose et à cause de quelque chose ?

— En vue de quelque chose et à cause de quelque chose.

— Et cet objet en vue duquel l’ami aime son ami, lui est-il ami, ou n’est-il ni ami ni ennemi ?

— Je ne te suis pas bien, dit-il.

— Ce n’est pas étonnant, dis-je ; mais peut-être me suivras-tu de cette façon, et moi je crois que je saurai mieux ce que je dis. Le malade, nous le disions tout à l’heure, est ami du médecin, n’est-ce pas ?

— Oui.

— Mais s’il est ami du médecin, n’est-ce pas à cause de la maladie, en vue de la santé ?

— Si.