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le mode dorien, le seul qui soit grec. Cet homme-là n’a qu’à parler pour me mettre en joie, et j’ai aussitôt l’air d’être ami des discours, tant je goûte vivement ses paroles. Mais le discoureur opposé à celui-là m’agace d’autant plus qu’il semble parler mieux et alors j’ai l’air de quelqu’un qui déteste les discours.

Pour Socrate, je ne connais pas ses discours ; mais j’ai déjà, comme je vous l’ai dit, éprouvé sa valeur par ses actions, et, là, je l’ai trouvé digne de tenir de beaux discours avec une sincérité entière. Si donc il possède aussi ce don, je n’ai rien à lui refuser ; je me soumettrai volontiers à son examen, et je ne serai pas fâché de m’instruire. En cela, moi aussi, je suis le précepte de Solon, en le modifiant sur un point : je veux bien apprendre une foule de choses dans ma vieillesse, mais de la bouche d’un honnête homme seulement. Il faut qu’on m’accorde ce point, l’honnêteté du maître, afin que je n’aie pas l’air d’un esprit obtus, si je l’entends sans plaisir. Que d’ailleurs le maître soit plus jeune que moi, ou qu’il n’ait pas encore de réputation, ou qu’il ait quelque autre particularité, cela m’est absolument égal. Je t’invite donc, Socrate, à m’enseigner et à m’examiner ; de ton côté, tu apprendras ce que je sais. Les sentiments que j’ai pour toi datent du jour où tu as bravé le péril avec moi et où tu m’as donné de ta vertu la preuve qu’il faut en donner, si l’on veut qu’elle soit juste. Parle donc comme il te plaira, sans avoir aucun égard à notre âge.

SOCRATE

XV. — Ce n’est pas vous, je le vois, que nous pourrons accuser de vous dérober à la discussion et à la recherche que nous voulons faire de concert avec vous.

LYSIMAQUE

C’est bien ce que nous avons à faire, Socrate, car je te compte pour un des nôtres. Prends donc ma place dans l’intérêt de ces jeunes garçons, vois les questions que nous avons à poser à ces deux hommes, et délibère et discute avec eux. Car moi, j’oublie à présent, à cause d