’hui et ainsi ce sera demain, Socrate, qu’il te faudra quitter la vie.
SOCRATE
Il. — Eh bien, Criton, à la bonne fortune ! Si telle est la volonté des dieux, qu’il en soit ainsi. Cependant je ne crois pas qu’il arrive aujourd’hui.
CRITON
Sur quoi fondes-tu cette conjecture ?
SOCRATE
Je vais te le dire. C’est que je dois mourir le lendemain du jour où le vaisseau sera revenu.
CRITON
C’est en effet ce que disent ceux de qui cela dépend.
SOCRATE
C’est pourquoi je ne pense pas qu’il arrive en ce jour qui vient, mais demain. Je le conjecture d’un songe que j’ai eu tout à l’heure, cette nuit, et il se peut que tu aies bien fait de ne pas m’éveiller.
CRITON
Quel était donc ce songe ?
SOCRATE
J’ai cru voir venir à moi une femme belle et majestueuse, vêtue de blanc, qui m’appelait et me disait : « Socrate, tu arriveras dans trois jours dans la fertile Phthie.
CRITON
Il est étrange, ton songe, Socrate.
SOCRATE
Il est clair, au contraire, Criton, si je ne me trompe.
CRITON
III. — Il ne l’est que trop, je pense. Mais une dernière fois, merveilleux Socrate, écoute-moi et sauve ta vie. Car pour moi, ta mort entraînera plus d’un malheur outre que je serai privé d’un ami comme il est